R. Schillinger, Efectis : « Myral met la sécurité incendie sur un piédestal ! »
Myral est identifié aujourd’hui comme l’un des acteurs français de la façade référents sur la problématique de la résistance au feu. En effet, depuis plusieurs années, le bureau d’études mène une campagne d’essais pour comprendre le comportement de son produit face au risque incendie, se conformer aux réglementations, ainsi que proposer des systèmes performants et un accompagnement à ses clients. Une multitude de tests (classement M, puis essai SBI, puis 6 essais LEPIR) effectués sous le contrôle d’Efectis, l’un des principaux laboratoires spécialistes du feu. Rencontre avec le responsable des essais de façades, Renaud Schillinger…
Pouvez-vous nous présenter Efectis ?
Renaud Schillinger : Dotés de 240 collaborateurs, nous sommes un laboratoire spécialiste de la science du feu au sens large : réaction et résistance au feu, ingénierie incendie, expertise, formation, inspection et certification. Nous avons trois principales filiales en France, aux Pays-Bas et en Turquie. Une 4ème filiale s’est greffée en 2018 au Royaume Uni. Nous sommes aussi présents en Espagne. En ce qui concerne notre pays, nous somme agréés par le ministère de l’intérieur, notifiés pour le marquage CE, et nous disposons de deux laboratoires et d’une plateforme d’essais spécifiques.
Quelle est actuellement la place de la réglementation du risque incendie dans le secteur de la construction ?
Renaud Schillinger : Lorsque l’on parle du cadre réglementaire de la construction, il faut essayer de différencier les exigences demandées au bâti. Il y a en effet celles qui ont trait à la sécurité, parmi lesquelles on retrouve la sécurité incendie, et celles qui sont plutôt liées au confort par exemple la thermique ou à l’acoustique. La sécurité incendie est aujourd’hui certainement prédominante en termes de contraintes et d’impact sur le coût de la construction par rapport à beaucoup d’autres exigences que l’on peut demander aux bâtiments.
En matière de risque incendie, « il y a des industriels très proactifs et d’autres qui sont beaucoup plus passifs… »
C’est donc l’un des éléments majeurs d’un projet ?
Renaud Schillinger : Ça devient surtout le cas pour certaines typologies de bâtiments. Il ne faut pas faire une trop grande généralisation. Aujourd’hui pour les habitations de 1ère et 2ème famille, ce n’est clairement pas ce qui va dimensionner le bâtiment. Mais lorsqu’il s’agit d’un bâtiment ERP ou d’habitations de 3ème ou 4ème famille, c’est beaucoup plus déterminant.
Avez-vous l’impression que les industriels s’intéressent suffisamment à la connaissance de leur produit face au risque incendie ?
Renaud Schillinger : Malheureusement, il y a une approche à deux vitesses. Nous voyons aujourd’hui des industriels très concernés par le sujet, qui ont envie de mettre sur le marché des produits sûrs en travaillant en amont des projets. Et hélas, vous avez une seconde catégorie d’industriels qui vont se contenter d’engager des démarches uniquement quand on leur impose et après avoir épuisé toutes les possibilités de déroger sur projet. Il y a donc des gens très proactifs et d’autres qui sont beaucoup plus passifs…
Ces industriels proactifs, comment engagent-ils la reconnaissance de leurs produits face au risque incendie ?
Renaud Schillinger : Pour certains, cela a toujours été dans leurs gènes. Mais on part généralement des exigences fixées par les réglementations. Elles énoncent les objectifs à atteindre, voire même les performances à viser par type de produits selon la typologie des bâtiments. En fonction du marché visé, ici les procédés d’isolation thermique extérieure de façade, ils doivent se rapprocher d’un laboratoire agréé par le ministère de l’Intérieur pour obtenir les documents leur permettant la mise sur le marché. En France, il y a, trois laboratoires agréés par le ministère pour la résistance au feu et 7 pour la réaction au feu. Pour réaliser ce type d’étude et délivrer ces documents la double compétence, réaction et résistance au feu, est nécessaire. Efectis la possède.
« Une démarche valorisante pour notre laboratoire »
Aujourd’hui, il y a deux possibilités : figurer dans un guide de préconisation ou comme Myral entamer une démarche individuelle auprès d’un laboratoire ?
Renaud Schillinger : Si on parle uniquement des procédés d’isolation thermique par l’extérieur de façade, des travaux ont été engagés à titre syndical et ont conduit en effet à l’élaboration de guides qui sont aujourd’hui publics. Il en existe 3 : un guide pour la construction bois, un autre pour les bardages installés sur maçonnerie et un dernier pour les ETICS-PSE sur maçonnerie. Depuis la parution de ces guides, les industriels ont donc deux options. Soit leurs produits rentrent dans l’un de ces guides, ils cochent alors toutes les cases pour être éligibles au domaine d’emploi prévu par ces textes. Le guide vaut alors appréciation de laboratoire tel que cela a été précisé dans les arrêtés du 7 août 2019. Soit leurs produits ne rentrent pas dans ces guides et ils ont alors la possibilité d’engager une démarche individuelle propre à leurs produits. Elle consistera à réaliser un programme de connaissance et de qualification de leurs produits qui peut aboutir à des solutions plus optimisées que ce qui figure aujourd’hui dans les guides. Ces programmes peuvent s’appuyer sur des essais petite et grande échelle, des calculs et des modélisations numériques. Les conclusions de ces études sont formalisées par des appréciations de laboratoire agréé.
Une démarche, comme celle de Myral, qui fait tester son produit sans hypothèse pour essayer de d’obtenir des appréciations de laboratoire vous paraît donc intéressante ?
Renaud Schillinger : Il faut se souvenir qu’avant 2013 très peu de systèmes d’ITE avaient été testés à grande échelle selon le protocole LEPIR2, peu de retours d’expérience étaient donc disponibles, il a fallu construire nos raisonnements et notre expertise à partir des autres outils à notre disposition. Pour moi, ce sont des projets intéressants à partir du moment où on les aborde comme l’a fait Myral. C’est à dire qu’il y a eu une 1ère phase de découverte du comportement au feu de leur produit. Puis il y en a eu une seconde où nous avons pu varianter et réaliser une étude paramétrique pour vérifier quels étaient les facteurs les plus impactant pour le comportement au feu du système. Nous avons joué sur ces facteurs-là pour parvenir à des solutions a fortiori sûres. La démarche est évidemment relativement longue. Il s’agit tout de même de plus de deux ans de travaux mais ça a été particulièrement intéressant. C’est une démarche toujours valorisante pour notre laboratoire.
L’idée de Myral est de mieux comprendre le comportement de son produit au feu pour finalement mieux s’adapter et peut-être ouvrir de nouveaux domaines d’emploi…
Renaud Schillinger : Oui et c’est une démarche intéressante. Nous avons commencé avec un ensemble de domaines d’emploi visés relativement restreints ou raisonnables en termes d’investissements. Et une fois que nous avions augmenté nos connaissances du produit, nous avons pu nous pencher sur la manière d’évaluer l’extension requise par Myral du domaine d’emploi que nous avions validé jusqu’alors. Nous avons ainsi fait évoluer les paramètres de notre étude. Nous avons travaillé pour essayer de valider le domaine d’emploi le plus étendu à partir des qualifications réalisées.
Que pensez-vous de la démarche de Myral qui consiste à privilégier la connaissance du risque incendie et à aller vers une solution de bardage non ventilé ?
Renaud Schillinger : Avec notre regard extérieur, on peut dire que sur l’ensemble de l’étude, c’est tout à l’honneur de Myral d’avoir mis la sécurité incendie sur un piédestal avec ce choix d’une solution de bardage sans effet cheminée. Sur le fait que Myral se tourne vers la vêture, en termes de sécurité, pour nous, c’était une seule technique nouvelle à évaluer. La question de la lame d’air est un des facteurs les plus discriminants des systèmes de façades. Quand vous avez une lame d’air, vous savez que le risque est potentiellement supérieur à celui d’un procédé similaire mais sans lame d’air…
Dernier fait en date, votre laboratoire vient de classer le système Myral (Myral M32 + isolant Kooltherm K15 de Kingspan) EI30, c’est-à-dire coupe-feu 30 minutes... Qu’est-ce que cela veut dire pour Myral ?
Renaud Schillinger : il s’agit d’une réponse qu’a voulu apporter Myral à la récente introduction dans la réglementation façade, de la notion d’écran thermique. Cette performance signifie que le complexe testé est en mesure de protéger durant 30 minutes de feu conventionnel un éventuel matériau combustible se trouvant derrière. Cela peut leur permettre d’alléger les dispositions imposées à ce jour pour une mise en œuvre sur construction à ossature bois.